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Fake japanese knives. Décoder le vrai du faux.

Rançon de la gloire, la coutellerie japonaise est décidément devenue un Far West sans foi ni loi où les meilleurs marketeurs s’écharpent à coups d’argumentaires copiés à droite et à gauche. Chaque année c’est pire mais cela devient de plus en plus difficile de séparer le bon grain de l’ivraie tellement les manipulateurs sont devenus bons. La grosse ficelle : tel site qui a pignon sur rue (vu récemment La Redoute) va faire une publicité sur Google avec le terme de couteau japonais et renvoyer sur tout à fait autre chose. Mais souvent, c’est beaucoup plus sournois. Ci-dessous quelques éléments de décryptage.

Tout d’abord, lorsque vous achetez sur Internet faites bien attention que vous trouvez les mentions légales, raison sociale, numéro de téléphone, capital social, l’adresse du siège social ; mais aussi : le nom du directeur ou du codirecteur de la publication et, le cas échéant, celui du responsable de la rédaction ; le nom, la dénomination, l’adresse et le numéro de téléphone du prestataire d’hébergement. Si l’une ou l’autre de ces informations fait défaut, il y a infraction pénale.  Les élucubrations du genre “tranchant inégalé” (ce qui va être difficile à prouver, restons modestes :-), où “Il faut plus de deux mois à nos artisans pour fabriquer un couteau” (si effectivement il fallait deux mois, il vaudrait plus cher que cela !) côtoient des emballages avec le Fuji-Yama dessus, les spécialistes reconnaîtront l’imposture.

Certains argumentaires sont spécieux mais aussi retors :

Les couteaux japonais sont tranchants, précis et beaux, mais aussi fragiles et enclins à rouiller. C’est faux, seuls les aciers non-oxydables sont sensibles à l’oxydation, par définition ; des aciers comme le VG10 (Kasumi), MBS26 (Masahiro) ou les Chroma, contiennent suffisamment d’éléments anti-corrosifs pour opposer barrière à la rouille. Les couteaux occidentaux sont robustes, durables et inoxydables mais souvent lourds, imprécis et s’émoussent rapidement” pour amener l’explosion finale : “Vous n’avez plus à choisir, K…ï vous offre le meilleur des deux mondes“. Et paf dans le pif à tout le monde, les Japonais, les Allemands… Récemment encore, la société qui les commercialise affirmait que c’est pour cela qu’elle se dénomme ainsi car cela signifie “solide”. Or leur acronyme venu de nulle part ne signifie rien en japonais. C’est du mauvais marketing.

Pour couronner le tout on prend des chefs inconnus au bataillon comme référentiels qui, d’après la tenue en mains artificielle du couteau, posent pour la photo, puis on s’achète les premières reviews chez des soi-disant “testeurs” Amazon payés pour amorcer le dispositif, nous avions déjà dénoncé cette pratique. Sauf qu’une fois de vrais acheteurs confrontés à la qualité longue du produit et non pas la qualité déballée, les commentaires négatifs pointent. Alors soit les testeurs ont reçu un modèle spécial pour eux, soit ils ne testent rien. Cerise sur le gâteau, on essaie de raccrocher le wagon au nom d’une gamme connue d’un authentique manufacturier, celui qui prétend réunir le meilleur des deux mondes n’a rien trouvé de mieux que dénommer sa gamme du même nom qu’une des nôtres. C’est déloyal et notre pain quotidien de retoquer ces mystificateurs, mais aussi les consommateurs sont floués. 

Autre grand classique, l’acier japonais à toutes les sauces ou le “style” japonais. Hum, hum, méfiance. Nous dénichons par exemple sur Amazon un titre aguicheur qui mentionne : acier VG10 60° HRC, dont le prix final représente à peu près 100 grammes dudit matériau, valeur 2010 (c’est à dire 30 USD le kilo, aujourd’hui le double). Un peu plus loin on lit 58° HRC, puis dans un 3ème élément de texte, 55° en… acier allemand ! Il faudrait savoir, acier japonais ou pas, 60 HRC ou 55 ? Le reste est à l’unisson, c’est évidemment une grosse tartufferie de quelqu’un qui s’emmêle les pinceaux. Il faut savoir que le fabricant japonais du VG10 n’a pas réussi à déposer son nom en Chine, les autorités l’ont considéré trop commun. Ceci ouvre la porte aux fake.

Se méfier comme de la peste des pseudo-comparateurs, sites qui participent au “Programme Partenaires d’Amazon”, c’est un programme d’affiliation qui renvoie systématiquement sur Amazon en priorité sur les “business brands”, qui payent la pub Amazon. Les sites sont souvent localisés à l’étranger et évidemment ne comparent rien du tout. Vous aurez ici aussi des pseudo-chefs locaux inconnus du bataillon, qui pensent qu’en tant que chefs ils ont le droit de nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Dans ce lot de partenaires Amazon quelques exemples avec : eComparatif.fr, localisé en Slovaquie et… hébergé aux Etats-Unis, journaldecuisson.com (Roumanie), meilleurtest.fr (Chypre), 99 % des produits “comparés” n’ont aucune once de japonais et bien sûr on ne sait pas à qui on à faire et où il habite. Se méfier aussi des sites uni-personnels qui ne font que commander à la pièce dès qu’ils reçoivent une commande et livrer… ou pas. Nous avons repéré de nombreux sites qui tous atterrissent tôt ou tard chez stop-arnaques : www.kaitsuko.fr, www.saikoto.com, www.okouto.com… Exemple :

kaitsuko.fr | info@kaitsuko.fr | Site internet frauduleux | 44 commentaires (signal-arnaques.com)

Ce site a été contacté de notre part pour demander des explications avec copie à la DGCCRF. La semaine d’après ils changeaient  de localisation, de Metz (!) à Hong-Kong ! 🙂 

L’an dernier ils portaient d’autres noms ravanee.com, okayo.com, saikiru.com, ils proposent tous la même marchandise de la même usine. Le stratagème est toujours le même, fixer un prix fictif très haut pour une marchandise qui vaut 10 % de ce prix, puis faire un prix barré. Vous avez sur ces sites une ribambelle de faux damas, certains ne livrent jamais, d’autres vous font payer les taxes à l’importation. Et quid du SAV “à vie” lorsqu’ils auront disparu une fois leurs forfaits accomplis. Attention aux faux avis qui sont légion. Ils se reconnaissent parfois au clavier sans accent employé, la plupart sont beubeus.